jeudi 29 janvier 2015

Néron et Agrippine au bord du Rhin (1/2)


Je vous disais dans l'article précédent que je m'engageais désormais sur des chemins médiévaux. Toutefois ces chemins finissent toujours par me ramener aux chemins antiques. C'est aussi le cas avec la ville de Cologne. Je vous ai parlé de mon roman en gestation qui se déroule à Cologne dans la première moitié du XVIe s. Je n'ai pas vraiment choisi ce lieu, qui m'a été imposé par l'étincelle qui a donné naissance à mon roman, un tableau (suivi de plusieurs autres) du peintre Barthel Bruyn, actif précisément à Cologne à cette époque. Or, au fur et à mesure que je me renseignais sur cette ville, elle est devenu bien plus que le simple décor du roman, presque un personnage à part entière !
Et ce dès sa fondation, qui nous plonge d'emblée dans les débuts sanglants de l'empire romain. Sa création proprement dite remonte à 38 ou à 20 (selon les sources) av. JC, lorsqu'Agrippa, le meilleur ami d'Octave-Auguste (1er empereur romain) et son futur gendre, installe sur le bord romain du Rhin une colonie de peuplement pour les Ubiens, tribu germanique venu de l'autre côté du Rhin, mais malmenés par les autres tribus germaniques en raison de leur alliance avec les Romains. Ce n'est donc d'abord qu'une sorte de camp militaire amélioré qui s'appelle «Oppidum des Ubiens » (« Oppidum Ubiorum »). En 8 ou 5 av. JC, elle accueille un autel du culte d'Auguste (en faisant donc ainsi une sorte de « capitale » de la Germanie (en Gaule, un semblable autel était installé à Lyon, ce qui en faisait la « capitale » des trois provinces gauloises)), et elle prend le nom d' « Autel des Ubiens » (« Ara Ubiorum »).
Or, en 15 ap. JC, un an après la mort d'Auguste, son petit-neveu Germanicus, un jeune homme brillant et apprécié de nombreux Romains, dirige les légions romaines stationnées sur les bords du Rhin. Les hommes de pouvoir n'ont pas attendu notre siècle pour comprendre l'effet positif sur le peuple de s'afficher dans leur vie familiale. Germanicus a donc emmené avec lui sur le front sa femme Agrippine enceinte et ses trois premiers enfants, dont le plus petit a droit à un petit costume de légionnaire romain ajusté à sa taille, qui le fait surnommer affectueusement par les soldats « Caligula » (c'est-à-dire « Petite caliga », la « caliga » étant la sandale du légionnaire), surnom qui restera dans l'histoire quand des années plus tard il deviendra empereur. Agrippine accouche dans l'oppidum même : le quatrième enfant du couple est une fille, elle est nommée « Agrippine », comme sa mère. Oui, c'est celle que vous connaissez, c'est la mère de Néron.
En 50 ap. JC, cette petite Agrippine, après les morts (suspectes?) de ses deux premiers maris, est mariée depuis un an à son oncle Claude, empereur. Ce dernier décide d'honorer le lieu de naissance de sa femme en lui donnant le statut officiel de colonie romaine. La ville s'appellera désormais « Colonia Claudia Ara Agrippinensis » (« Colonie claudienne, autel d'Agrippine ») ou selon une variante « Colonia Claudia Ara Agrippinensium » (« Colonie claudienne, autel des Agrippiniens »).
Je ne crois pas qu'il existe beaucoup d'autres villes dans le monde qui tirent leur nom (« Cologne » ou « Köln » est le « Colonia » de « Colonia Claudia Ara Agrippinensis ») et leur fondation d'une personne née à cet endroit ! Et pas n'importe quelle personne : peut-être la femme à la réputation la plus sulfureuse de toute l'histoire romaine, accusée d'avoir été l'amante de son frère Caligula, du philosophe Sénèque, et de bien d'autres, accusée d'avoir empoisonné ses trois maris successifs et bien d'autres personnes ; mais qui sait combien de ces accusations étaient fondées ? C'est aussi une tragique figure de mère, qui doit sa mort à son propre fils et qui, quand arrive le soldat envoyé par Néron chargé de l'exécuter, lui demande de « frapper au ventre »...

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1 commentaire:

  1. Merci Nadia !
    Et si vous ne connaissez pas, je vous invite chaudement à découvrir Murena, un bijou de la bande dessinée : http://fr.wikipedia.org/wiki/Murena

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